« Demeurez dans mon amour » Jean 15,9

Les sœurs protestantes de Grandchamp, qui ont préparé le thème de la semaine de prière pour l’unité 2021, sont engagées avec nous depuis longtemps pour préparer la version spécifique d’Église verte dédiée aux monastères. Comme beaucoup d’autres communautés religieuses, elles ont conscience de l’ampleur de la crise écologique et de l’enjeu que celle-ci représente aussi bien pour notre monde que pour notre foi.

À Église verte nous sommes convaincus que l’approche chrétienne de l’écologie est une démarche qui ne pousse à travailler dans le sens de l’unité des chrétiens. En effet l’urgence écologique, tout comme le dialogue œcuménique, nous amène, dans une démarche de dépouillement plus ou moins confortable, à nous concentrer sur l’essentiel. Là où la civilisation occidentale moderne pousse à l’accumulation d’objets et l’accélération de toutes choses, les croyants sensibles à l’écologie appellent à ralentir et à prendre du recul.

Ainsi chacune de nos traditions, en travaillant à mieux comprendre la place des enjeux écologiques dans la théologie chrétienne, a produit des nouvelles formulations qui expriment toutes la nécessité d’une recherche d’authenticité et de travail sur soi : écologie intégrale pour l’encyclique Laudato Si’, conversion écologique pour le synode de l’Église protestante unie de France, écospiritualité pour le théologien orthodoxe Michel Maxime Egger ou écologie profonde pour le philosophe norvégien Arne Næss, toutes ces expressions traduisent à leur manière un effort de changement et une quête d’authenticité. Dès lors, avec cet effort de dépouillement et de sobriété, ce que nous partageons en commun dans la foi devient de plus en plus sincère et de plus en plus visible.

La foi est un trésor que le Christ nous demande de partager. Or face aux inquiétudes générées par la crise multiforme qui ébranle tous nos repères, porter et dire l’espérance au-delà des murs de nos églises et de nos temples est notre principale mission. Allons-nous le faire chacun de notre côté ? Allons-nous saisir cet enjeu du siècle sans concertation, sans unir nos forces ? L’œcuménisme est né dans la mission et la grande conférence d’Edimbourg (1910) a été un jalon qui a marqué le début des rapprochements. Un peu plus tard ce sont dans les tranchées de la grande guerre que catholiques et protestants ont versé le même sang et communié aux mêmes souffrances. Alors si nous voulons être porteurs d’espérance à notre tour, dans un monde qui ne sait plus trop en quoi espérer, nous sommes obligés de le faire ensemble et en se respectant mutuellement.

Le thème choisi par les sœurs de Grandchamp nous invite enfin à demeurer dans l’amour, et donc d’une certaine manière à mieux habiter ce monde que le pape François appelle la maison commune. Mais comment mieux habiter le monde ? Comment mieux habiter nos propres vies ? Ces deux questions s’entremêlent et l’inscription de note vie de foi dans une communauté chrétienne offre l’occasion de bien les articuler. C’est alors que nous découvrons qu’il y a de nombreuses manières d’habiter le monde et que cette diversité est une richesse.

Là aussi les enjeux écologiques et théologiques s’entrecroisent : dans les deux cas la biodiversité n’est pas d’abord une source de difficulté, c’est avant tout une source d’émerveillement et de joie que nous offre le seul et unique Dieu créateur, dans les deux cas il s’agit d’un trésor à préserver et à faire fructifier.

Robin Sautter

Pasteur de l’Église protestante unie de France

Délégué de l’Église protestante à Église verte

Elena Lasida

Chargée de mission « Écologie et société » à la Conférence des évêques de France

Déléguée de l’Église catholique à Église Verte