Depuis 2002, les Entretiens de Valpré rassemblent pendant une journée et demie des chefs d’entreprises, des cadres, des entrepreneurs et des étudiants, pour favoriser inspiration, échange et expérience sur les enjeux clés de l’économie, de l’entreprise, et de la société à la lumière de la pensée sociale chrétienne. Autour d’un thème à chaque fois différent, de nombreux invités prestigieux issus de tous horizons partagent réflexions et expériences, lors de conférences, débats et ateliers, dans une ambiance empreinte de sincérité, de pluralité, de bienveillance et de fraternité.
Le thème du développement humain intégral en tant que tel, sera celui des Entretiens en 2022… à l’occasion de leur 20ème édition. En attendant, les Entretiens nous livrent le résultat d’une enquête sur la responsabilité, sûrement un cadre intéressant pour le futur débat écologique.
Le doute n’est plus permis : demain sera responsable !
A l’occasion de la 18è édition des Entretiens de Valpré*, qui portait sur le thème de la responsabilité, près de 200 dirigeants d’entreprise, PDG ou directeurs généraux, membres de comités exécutifs ou cadres dirigeants ont répondu à un questionnaire en ligne – conçu avec l’aide de notre partenaire Kéa & Partners** – pour tenter de répondre à cette question centrale : Qu’est-ce qu’être un manager responsable aujourd’hui, à l’heure où grandissent les attentes vis-à-vis des entreprises ? En voici les principaux résultats.
L’entreprise responsable avance à petits pas
Si une large majorité des chefs d’entreprises (76%) s’accordent pour dire que la responsabilité d’entreprise est à la fois une responsabilité de moyens et de résultats, elle est encore perçue comme un champ de contraintes plus que de valeurs. On se contente souvent de « rester dans le match » en optant pour une logique de suiveurs qui adopte les meilleurs pratiques du marché mais ne va pas jusqu’à faire de cette responsabilité un levier d’innovation, de différenciation ou d’avantage concurrentiel. Or le chemin de la responsabilité nécessite des transformations très profondes : en favorisant les changements de pratiques dans les métiers, en engageant les RH dans leur accompagnement responsable des salariés, en modifiant les objectifs des parties prenantes… Seuls 23% des interviewés considéraient que leur entreprise était parvenue à créer le cadre de référence d’une contribution au bien commun contre 49% qui estimaient être dans la moyenne d’une mise en conformité.
Les comportements responsables restent (encore) trop souvent une affaire de pouvoir et de long terme
Les dirigeants sont surtout très demandeurs de partage et d’échanges avec leurs homologues. Pour aller plus loin dans l’exercice d’un management responsable, 34 % des PDG citent ainsi le partage avec les pairs, quand le recours à des experts ne suscite que 9 % des réponses. Les salariés sont d’ailleurs considérés comme les premiers leviers de changement dans l’entreprise, juste devant le PDG lui-même. Suit la société civile, juste devant les clients. L’État n’est considéré comme un levier de changement que pour 20 % des répondants. Sans surprise, les marchés sont considérés à l’inverse comme les principaux freins à la mise en place d’une politique de RSE. Ce qui créée bien évidemment une tension entre l’anticipation nécessaire dans une transformation agissante pour le bien commun et une obligation de résultats à court terme liée aux contraintes économiques.
La fin du manager super héros
Le manager responsable n’est pour autant plus imaginé comme un leader qui décide et qui tranche. Il doit avant tout créer les conditions de la responsabilité d’un collectif cohérent au service du bien commun. Il a un devoir d’exemplarité qui inspire et qu’il illustre en faisant confiance aux potentiels de ses équipes et de ses partenaires. Cette montée en responsabilité doit être effectivement un sujet inclusif qui ne doit pas laisser une partie des équipes au bord de la route. Ainsi le management et les parties prenantes intermédiaires, plus orientés vers des objectifs court terme ne doivent pas pour autant être moins contributeurs dans ce changement de paradigme.
La crise sanitaire accélère t’elle la croissance des entreprises responsables ?
Quelle est l’origine de la bonne santé des entrepreneurs responsables au milieu de cette valse de dépôts de bilan et de plans sociaux ? « La crise du Covid a révélé la résilience comme une force à cultiver par les entreprises pour affronter, voire sublimer les chocs », estime Hervé Lefèvre, cofondateur du cabinet de conseil en stratégie Kea & Partners. Selon lui, les organisations qui se sont construites sur un socle de valeurs fortes n’ont pas eu un réflexe de survie, qui consiste à se replier sur soi, mais à l’inverse une soif de coopération. « Dans la mesure où ces entrepreneurs s’inscrivent dans le long terme, tout ce qu’ils font vise à soutenir leur écosystème global et pas seulement leur propre activité. Cette démarche collaborative constitue un atout indéniable. »
En conclusion, une nouvelle ère semble s’installer dans une vision plus optimiste et porteuse d’espoir basée sur une société, une économie, en recherche de sens dont l’entreprise responsable représente l’une des principales caractéristiques.
*14 et 15 novembre 2019
** 1er cabinet conseil en stratégie « société à mission » www.kea-partners.com