À l’occasion de la sortie du livre en 2017 : « Tous utiles, tous acteurs », Monseigneur Jean-Luc Brunin, évêque du Havre et Président du Conseil Famille et société aborde la question du chômage, du retour à l’emploi et apporte des pistes de réflexion pour un dialogue sur le travail, l’emploi et l’activité.
Voilà plusieurs décennies que le chômage s’est imposé dans le paysage de nos sociétés, en France comme au niveau mondial. Ce qui peut être qualifié de fléau mine la cohésion sociale, plonge des personnes et des familles dans l’insécurité du lendemain, aggrave les situations de pauvreté et se pose comme un obstacle défiant toute politique de développement social.
Il serait injuste de dire que les pouvoirs publics (État, collectivités territoriales …), les institutions sociales ou les associations n’ont rien tenté pour enrayer ce qui affecte durablement notre société. Même si nous ne parlons plus de « retour au plein emploi », nous continuons de penser et de travailler au « retour vers l’emploi ». Pourtant, force est de constater que l’inactivité plonge des millions de personnes dans un sentiment d’inutilité sociale et d’exclusion. La société ne peut se résigner à cette « culture du déchet » (Pape François).
Prenant acte de la situation qui laisse une impression d’énorme gâchis social, le Conseil Famille et Société de la Conférence des évêques de France, a voulu reprendre à frais nouveaux la question du chômage. Nous suivons en cela le style du pape François qui n’envisage jamais les réalités humaines à partir de la seule doctrine, du dogme ou des principes moraux, mais choisit délibérément de prêter d’abord attention à l’expérience concrète des personnes. « La réalité – nous dit-il – est plus que l’idée ».
Dans ce document, vous ne trouverez pas de solutions techniques pour enrayer le chômage ; ce n’est pas le rôle de l’Église. Nous voulons surtout inviter à changer de regard et aborder la question de l’inactivité sociale selon un nouveau paradigme. Au-delà des courbes et des statistiques du chômage qui offrent une lisibilité quantitative, nous invitons à poser un regard qualitatif sur les réalités vécues par les femmes et les hommes durablement exclus de l’emploi, et singulièrement les jeunes et les seniors qui sont les plus marqués. C’est ainsi que, dans le fil du texte, nous laissons la parole à des personnes vivant cette expérience qui génère un sentiment d’inutilité et de mort sociale. Nous abordons ainsi la question du chômage avec le parti-pris de l’humain, osant questionner un système économique qui ne le place pas toujours au centre. Pour autant, il ne saurait être question d’en rester à la contestation ou à la seule indignation éthique face à ce qui demeure insupportable dans notre société visant la liberté, l’égalité et la fraternité.
Nous voulons aider à mesurer les enjeux humains d’une action visant à enrayer l’aggravation d’un chômage de masse. Refusant l’indifférence et le fatalisme, nous voulons retrouver à partir de l’enseignement social de l’Église, la valeur humaine du travail afin d’offrir des perspectives concrètes conduisant à une société de pleine activité. Elles peuvent être indicatrices de voies possibles à approfondir ensemble. Les suggestions présentées dans le document visent à faire émerger une société plus juste et plus inclusive pour des millions de nos concitoyens condamnés à l’inutilité sociale alors qu’ils possèdent des talents inemployés.
Comme les autres documents du Conseil Famille et Société, celui-ci veut offrir à nos concitoyens, catholiques ou non, responsables politiques, professionnels du social ou encore militants associatifs, des éléments de réflexion et de discernement en vue d’une action concertée sur des chemins nouveaux. C’est une contribution au débat pour la recherche d’une politique visant clairement l’insertion de caractère social. De nombreux besoins sociaux restent aujourd’hui sans réponse. Ils sont un véritable gisement d’activités multiples qui permettraient de solliciter des compétences inemployées. S’engager dans cette voie permettrait d’être « tous utiles, tous acteurs ».
Quatrième de couverture du livre : « Tous utiles, tous acteurs »
Le chômage de masse touche notre pays depuis des décennies, nourrissant chez les personnes concernées un fort sentiment d’inutilité sociale. Au-delà de la dimension individuelle et familiale, c’est l’ensemble de la société qui pâtit de cette situation. Pour la société, la mise à l’écart de tant de personnes est une perte énorme de talents inemployés, d’opportunités manquées et de liens familiaux ou sociaux brisés. La cohésion sociale et le vivre ensemble s’en trouvent fragilisés. Nous ne pouvons-nous satisfaire de cette « culture du déchet ». Cette situation est d’autant plus paradoxale qu’il existe dans notre pays des besoins considérés comme essentiels qui ne sont pas satisfaits. Nous n’avons pas tout essayé. Des pistes de solutions existent qui requièrent la mobilisation de tous les acteurs pour construire une société de confiance et inclusive. C’est à cela que ce texte appelle.