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Mag #4
4 – Quatrième numéro
Non classé

La sobriété de Noël

Publié le 3 décembre 2020

Mgr Jean-Marc Eychenne est évêque de Pamiers, Couserans et Mirepoix.

« La spiritualité chrétienne propose une croissance par la sobriété, et une capacité de jouir avec peu. C’est un retour à la simplicité qui nous permet de nous arrêter pour apprécier ce qui est petit, pour remercier des possibilités que la vie offre, sans nous attacher à ce que nous avons, ni nous attrister de ce que nous ne possédons pas. Cela suppose d’éviter la dynamique de la domination et de la simple accumulation de plaisirs. » (Laudato Si’ – n° 222)

Assez souvent la sobriété dont nous parlons dans les périodes préparatoires aux grandes fêtes chrétiennes (Noël et Pâques), est associée à la tradition du jeûne, et vise à mieux maîtriser nos désirs tout en vivant du partage. Nous nous privons (souvent avec modération…) pour nous libérer un peu de ce qui nous ramène à nous (bien matériels, nourriture, plaisirs plus ou moins addictifs) et pour pouvoir partager à d’autres ce que nous n’avons pas consommé. Les divers « bols de riz » dont nous avons l’expérience dans nos paroisses et nos mouvements illustrent bien cela.

Avec la conversion écologique à laquelle nous sommes appelés en ce temps de l’Église du XXIème siècle, une autre piste a été ouverte. En consommant trop, non seulement nous sommes moins attentifs au partage des biens entre tous, mais nous abîmons la nature qui nous a été confiée, comme une mère ou comme une sœur, pour que nous prenions soin d’elle ; c’est elle qui nous nourrit et qui, par sa beauté, nous oriente aussi vers la contemplation du Créateur. « Si nous nous sentons intimement unis à tout ce qui existe, la sobriété et le souci de protection jailliront spontanément. La pauvreté et l’austérité de saint François n’étaient pas un ascétisme purement extérieur, mais quelque chose de plus radical : un renoncement à transformer la réalité en pur objet d’usage et de domination. » (Laudato Si’ n°11)

Nous pouvons penser que si le Fils de Dieu vient à nous dans une étable, entouré par de pauvres gens, c’est pour que nous admirions mieux l’abaissement de Roi du Ciel, qui ne s’invite pas dans un palais somptueux, mais rejoint les plus petits. Et en affirmant cela nous sommes dans le vrai. Mais le Seigneur ne voudrait-il pas aussi nous inviter tous par là à un style de vie sobre et joyeux ? S’il en était ainsi, cela pourrait modifier sensiblement, nos habitudes de vie quotidienne et nos « plans de carrière ». Serions-nous disposés à entendre cela ? J’entends déjà tel ou tel objecter : « Mon Père, n’exagérons tout de même pas ; nous ne sommes pas tous appelés à être de François ou Claire d’Assise ! » Qui sait … Ne mettons-nous pas un peu trop facilement cet argument en avant, pour ne pas vraiment entendre les appels de l’Évangile ? « C’est un exemple que je vous ai donné afin que vous fassiez, vous aussi, comme j’ai fait… » (Jn 13, 15)

Pourquoi rencontrons-nous aujourd’hui, des hommes et des femmes qui, sans se référer au Christ, mais prenant la mesure de la folie collective dans laquelle nous nous sommes engagés, choisissent de prendre des distances vis à vis de la surconsommation et trouvent des chemins de vie plus simple ? Ne seraient-ils pas de ceux qui nous désignent du doigt l’étoile de Noël ? Qu’ensemble nous puissions nous poser ces questions, ne serait pas sans utilité.

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